Autolyse 3/3
9. La place du sel ?
10. Tempérons !
11. à suivre ..et à poursuivre ! (Avantages de lAutolyse)
9. La place du sel ?
Lors de ces 8 essais complémentaires suivant sa première observation, le professeur Calvel utilise régulièrement le sel. Il faut dire quil utilise une farine à faible taux dextraction (type 55, soit ± 78 %), donc pauvre en sels minéraux. La raison principale de lajout de sel nest toutefois pas le déficit décrit ci-avant 38 . Labsence ou la présence de sel accélère ou freine lautolyse de la pâte. Ce qui donne une souplesse dutilisation au procédé, réduisant ou augmentant la durée de lautolyse, bien plus quen faisant décroître ou accroître les proportions dapport de pâtes autolysées, dit le professeur 39 . La présence du sel a également des effets inhibiteurs sur les protéases, enzymes provoquant la « pourriture » des pâtes ou dégradation des protéines que lon veut ici ménagée ou maîtrisée. Le professeur Calvel a dailleurs bien pressenti cette action régulatrice 40 . Le sel ralentira aussi le phénomène dosmose, si leau est trop salée (les cristaux de sel se dissolvent plus vite que lamidon), elle nentrera pas dans dautres cellules pour réduire la concentration en sel, au contraire 41 . Ainsi dans une moindre mesure, leau douce ( pauvre en sels minéraux) sera préférée à leau dure (riche en sels minéraux) pour des raisons assez semblable. Bref, la présence du sel nest sans conséquence. Dautant quil sagit de la première substance « externe » ajouté à la plus simple des pâtes.
A chacun den mesurer limportance.
10. Tempérons !
Pour la température, il faut prendre en compte lévolution du travail à laide des chambres de fermentation contrôlée. Celles-ci confirment à souhait lobservation du professeur ; lallongement de la durée. La souplesse dutilisation du procédé dautolyse pourrait bien migrer de lemploi du sel ou pas vers ces enceintes de réfrigération à froid positif. Les laboratoires ou ateliers de boulangerie sétant équipés dans le froid ces dernières années. Dautres normes ne freineront pas ce type dinvestissement 42 . Le froid positif apporte une maturation de la pâte également, les liaisons « hydro » sy sentent plus à laise. 43 Il faudra bien sur veiller à revenir graduellement à température ambiante 44 . Côté température supérieure à lambiante (22°C pour le professeur Calvel), cest clair que cela engendre de manière exponentielle une rapidité de dégradation. De plus si le professeur nentrevoyait que la dégradation ménagée du gluten pour atteindre un meilleur état de celui-ci, les autres composants de la farine se dégraderont en parallèle. Ainsi la dégradation de lamidon entraîne collant et pâte à aspect apurée peu souhaitable. Cest là quil nous faut repérer la plus grande limite du procédé.
11. à suivre ..et à poursuivre !
Cest pour les qualités plastiques de la pâte que le professeur Calvel a introduit le procédé 45 . Lors de sa conclusion en 1974, il écrivait « les résultats tant au niveau du professionnel que du consommateur que je suis me paraissent du plus grand intérêt ». « Lautolyse est loin sans doute davoir offert toutes les possibilités quelle recèle » 46 .
Avantages de lAUTOLYSE
Méthode naturelle de panification
Améliore la tolérance de la pâte
Améliore le lissage de la pâte
Rectifie la ténacité de la pâte
Améliore le volume du pain
Améliore la conservation du pain
Améliore les farines & pâtes acides
Réduit le temps de pétrissage
Améliore le goût du pain
Améliore lalvéolage de la mie
Permet déviter les oxydations
Permet dintégrer + dautres farines
Une des interprétations techniques à intégrer dans les effets de lautolyse serait à mon sens les qualités que peuvent apporter les pentosanes. Plus que le gluten , les pentosanes sont à laise dans ce procédé. Ces derniers jouent sur lamélioration du volume et sur un aspect que le professeur na pu observer, lamélioration de la conservation du pain 47 . Un aspect clairement démontré par Raymond Calvel est lamélioration dune farine acide impanifiable, par lautolyse. Nous lavons vu la « Quellstück » accompagne le levain dans toutes les recettes. Le « mariage » de la pâte autolysée et de la pâte fermentée au levain (plus acide) semble apporter des bénéfices quil serait bon dapprofondir sur le terrain 48. Le « mariage » pâte autolysée et pâte fermentée à la levure conduit aussi à dexcellents résultats 49 . Vous voyez, on peut mélanger avec succès, et vous avez une touche de plus à votre clavier. Lamélioration du goût relevé par le professeur mériterait que lon sy attarde plus, malgré les difficultés de lanalyse (critère subjectif ainsi que résultats et attentes variables).
Lamélioration du pétrissage est manifeste et dautant que lère du pétrissage intensif (en vogue en 1974) est terminé 50. La légère altération de lhydratation de la pâte est probablement du à la capacité dimprégnation de la pré-pâte appelée « autolyse » 51.
Cest « dans le respect de la nature des choses » que le professeur Calvel sinterroge souvent. Remercions-le que cet attachement et fidélité à cet état desprit, nous aie apporter cette méthode naturelle de panification.
Il reste au professionnel de la pâte de sinterroger, dexpérimenter, de confronter les écrits avec la réalité. Rien de tel pour être un peu plus « pris par la pâte » et gagné en motivation boulangère.
Cétait et cela restera, à suivre
38 Pour tenir une théorie toute mathématique, signalons que la farine type 55 utilisée par le professeur Calvel contient 0,5% de sels minéraux. Une farine complète type 150 en contient 1,7 à 2,2% de sels minéraux. Lajout du sel est généralement de 1,7 à 2 %
39 Il sagit des essais 6 et 9 repris dans R. CALVEL, p.293 & 296.

40 Bernard ONNO et Philippe ROUSSEL signale, p.308 & 309, que le sel est inhibiteur des protéases à partir de 3% par rapport à la farine. James MAC GUIRE,p.33, qui élabore ces rafraîchis de levains avec de la pâte autolysée, met tout le sel dans la pâte autolysée conservée à froid et par conséquent dans le levain .
41 Voir Hervé THYS, p.113. plus Martine LE MESTE et Bernard COLAS, p.6 qui écrivent « Il y a compétition entre le sel et les autres solutés vis à vis de leau ». Ce phénomène sera vécu aussi par les salaisons, où tout lart consiste à bien doser le sel pour gérer les échanges osmotiques.

42 On peut penser au surcoût du travail de nuit, à la réduction du temps de travail par exemple ainsi que les normes dhygiène et à létalement journalier de loffre du produit chaud.
43 Lessai n°3 du professeur Calvel sur la conservation au froid ne note aucun changement dhydratation de la pâte, malgré les différences dapports, voir Tab.2. en annexe. Un peu plus bas au froid négatif leau gèle et exprime ainsi à sa manière quelle se lie plus facilement entre-elles grâce au froid. Certains boulangers font avec succès, une autolyse la veille et la laisse au frigo pour la nuit.

44 Le professeur conservait sa pâte à 4°C pendant 36 heures et remontait à 18°C pendant 4 heures. R. CALVEL, 1974, p.291 & 292.
45 Vu létat très « hard » des blés dans son pays, laméricaine Maggie GLEZER, p.12, voit surtout dans les effets recherchés par lautolyse, le travail des enzymes protéolytiques. En relevant la contradiction de vouloir dégrader le gluten, dès lors quil faut par ailleurs le développer. En fait cest un rééquilibrage ou amélioration des effets du gluten qui est rechercher. Le gluten na pas une propriété, mais plusieurs.

46 R. CALVEL, 1974, p.296. Gérard MEUNIER, p.10 signale quil a recours à lautolyse les années des campagnes 91-92 et 92-93 pour pallier au manque de lissage au pétrissage, du probablement à la variété Soissons comportant beaucoup de protéines à haut poids moléculaires.

47 Une plus grande fixation deau permet une meilleure rétrogradation (ou recristalisation lente) de lamidon lors du rassissement du pain. Il faut probablement limputer aux pentosanes. Voir : J.L. MULTON, p.71 à 75 et chapitre Pentosanes.

48 James MAC GUIRE dit lutiliser avec succès, au départ pour des raisons pratiques. Lors de lentretien des levains après les jours de fermeture, celui-ci fait rafraîchir ses levains à laide de pâte autolysées. Pas besoin de personnel spécialisé et pas déclaboussures de farine lors de ce court retour au fournil, la veille de la panification.

49 Gérard MEUNIER fait deux pâtes une autolyse qui repose 12 à 15 h. et une pâte à la levure qui fermente pendant 5 h. Après il « marie » 31,25 % de pâte autolysée avec 12,5% de pâte fermentée pour la pâte à baguettes. 45% de pâte autolysée et 50% de pâte fermentée précéderont la pâte de pain de campagne. Pour le pain de mie, ce sera 50% de pâte autolysée et 50% de pâte fermentée à la levure qui suniront pour faire la pâte.
50 Ce pétrissage intensif peut même avoir pénalisé certains résultats.
51 Voir la note 24 de ce chapitre. La plus grosse perte dhydratation des essais du professeur Calvel sopère graduellement dans lessai n°2 sur la durée. On passe de 63,5% à 61,5% en passant de 0 à 24 heures, avec à chaque fois 20% dapport de pâte autolysée. Il semble que cette perte dhydration se réalise plus en pétrissage intensif ( = réduction de temps de fermentation) et restait fort stable en pétrissage conventionnel. Voir tableau 2 en annexe. Comme aucune perte de matière sèche ne se réalise, le professeur Calvel conseille dès lors de peser plus léger.