L'arrêté du 4 janvier 2016 sur les enzymes boulangères

Une lecture le temps d'une pause café
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Marc
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févr. 2016
mercredi
03
01:23

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De l'additif à l'enzyme
Nous vivons un passage « vers la naturalité » si l’on en crois le discours des fournisseurs de produits pour la boulangerie, il a été amorcé fin du siècle passé.
C’est répertorié comme cela par les articles techniques publiés lorsque le décret de pain de tradition française sort en octobre 1993. Presque comme une injonction, lorsqu’il passe le cap de la Commission Européenne (qui réchigne a rétrécir le «grand marché»), le décret sur le pain de tradition française s’appuie sur le fait que outre-Rhin, on a obtenu de la même Commission Européenne la possibilité d’avoir des bières étiquetées comme respectant la loi sur la pureté de la bière spécifique à l’Allemagne.
Rien d’autre que l’eau, le malt, le houblon et après la levure qui s’ajoutera lorsque celle-ci sera «découverte» et/ou reconnue. La «Reinheitgebot» date en effet de 1516 et de l’ex-Royaume de Bavière.
Ainsi la bière sans additif est pour l’Allemagne et le pain sans additif pour la France.
Si la bière allemande «pure» n’a pas le droit de contenir d’ajout d’enzymes exogènes (ne venant pas de la matière alimentaire mise en germination et/ou fermentation), le décret français à peine sorti de deux mois se voit autorisé par un courrier de la DGCCRF du 19 novembre 1993, l’ajout d’amylases fongiques et de gluten.
Il n’est pas étonnant que les entreprises engagées dans le secteur des produits dits améliorants de panification tentent de trouver la réplique assez vite en proposant les mêmes effets oxydants rapidement, texturant avec plus d’assurance et agissant sur la conservation en proposant l’ajout d’enzymes plutôt que des additifs.
On gomme ainsi de l’étiquette tous les E 300, E 322, E 471, E 270, E 260,… puisque l’enzyme est un auxiliaire technologique (processing aid, en anglais) sensé disparaître dans le produit lors de la transformation de ces produits alimentaires et de ce fait peuvent ne pas figurer sur l’étiquette.
L’arrêté ministériel du 4 janvier 2016 indique par contre une attitude partiel du statut de l’auxiliaire technologique tel que le définit la directive 89/107 art.1.3. en signalant seulement «la teneur résiduelle technologique inévitable».
Subtile stratégie qui occulte de la définition de l’auxiliaire technologique, signalant que la présence résiduel doit être «non intentionnelle» et se réaliser «à condition que ces résidus ne présentent pas de risque sanitaire et n’aient pas d’effets technologiques sur le produit fini».
Si la différence entre les statuts d’additif et d’auxiliaires technologiques réside principalement sur une présence non intentionnelle et est de l’ordre du résiduel, les premières communication de Novozymes en 1991 de l’enzyme amylase bactérienne autorisée en janvier 2016 se déclarent «agir dès Jour + 1».
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Après une prudence s’imposera dans les communications des firmes en déclarant que l’enzyme agit durant la panification même si la mie ne dépassent pas les 98 °C tant qu’il y a de l’eau dedans (c’est à dire jusqu’à la fin de la cuisson) et que l’amylase bactérienne est choisie en fonction de sa thermorésistance allant jusqu’à 95°C dans son optimum d’activité.
Son effet dit en anglais «freshness» agit sur l’état moléculaire de l’amidon gélatinisé.
Comment dès lors, évaluer avec le souci de respecter le consommateur, puisqu’aucune publicité nécessaire à tout contrôle sanitaire n’est effectuée.
D’autant que les enzymes sont des protéines actives (des matières fortement allerginisantes).
En Angleterre par exemple pour les produits nettoyants (secteur qui emploi à peu près 40 % du marché de l’industrie enzymatique), les produits de lessive signalent si ils sont «biological» (c'est-à-dire contenant des enzymes «gloutons») ou «non biological» (ne contenant pas d’enzymes).
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Ici dans l’alimentaire, rien de pareil, alors qu’au début on déclare l’intention d’agir après cuisson et que la teneur résiduelle est plus qu'inévitable.
On retrouve l’application de ces amylases bactériennes principalement dans les pains briochés et pains de mie industriels.


Une deuxième enzyme boulangère autorisée ce 6 janvier est la glucose-oxydase et elle n’est pas native dans la farine de blé.
Elle fut proposée dans les écrits dès 1996 pour remplacer les additifs oxydants tel l’acide ascorbique E 300 et le bromate déjà interdit en 1935 pour la panification en France, mais encore toléré aux Etats-Unis.
L’effet oxydant que l’on peut ainsi doser et généralement accélérer, va donner une prise de force plus rapide à la pâte à pain.
Tout ajout d’oxydant exogène se réalisera aux dépens de l’oxydation qui peut être plus positive au niveau goût lorsque celle-ci se réalise grâce à une longue fermentation qui a déjà des effets bénéfiques de formation de composants aromatiques et de dégradation de molécules nuisibles.
Ici dans l’arrêté du 4 janvier 2016 on signale l’action en d’autres termes «L’activité glucose oxydase doit être associée à une activité catalase, en quantité suffisante pour dégrader le peroxyde d’hydrogène au fur et à mesure de sa formation».
Si vous nous avez pas quitté après cette définition fort scientifique, sachez que le peroxyde d’hydrogène est appelé plus familièrement eau oxygénée.
Donc cet enzyme ajouté, exogène et non-native va apporter ce que les autres oxydants apportaient avant, de l’oxygène, qui lui va devoir se dégrader et s’associer souvent à d’autres opérations enzymatiques que l’on veut accélérer notamment les liens entre chaines d’hémicelluloses et de protéines.
En bio, le risque de l’emploi de ces enzymes toutes issues de microorganismes génétiquement modifiés est devenu de plus en plus cruciale depuis que le marché des enzymes produit de manière si efficiente à l’aide de microorganismes dont on introduit les gènes et que l’on produit à l’aide de fermenteurs bien plus rentablement que de l’extraire de fruits (papaye, ananas, figue) ou d’autres.
Or le règlement sur la transformation bio interdit l’emploi d’enzymes «recombinées», à voir avec votre organisme certificateur.

Les deux enzymes citées ici sont interdites dans le pain de tradition française, même si il est difficile de savoir par analyse si l’enzyme glucose-oxydase est présente.

Sans parler de la perte de savoir-faire professionnel, l’astuce de faire passer les effets voulus par les améliorants ou «convenience products» (=produits de confort pour les acheteurs boulangers) à l’auxiliaire, occulte ce que pourtant on demande aux petits transformateurs, de la transparence, de la fourche à la fourchette.

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Bon pain
Marc
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Roland
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févr. 2016
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07:50

l'industrie chimique continue son travail de sape, le naturel est chassé! :enerve
Ambassadeur du pain
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