Traduction de : Seigle fourrager/Seigle panifiable (article technique)
Texte traduit par Eric MICHA et Marc DEWALQUE d’un passage qui a été publié dans :
ROGGEN, (trad. : SEIGLE), éd. Behr’s, 1988, p.17 à 20. L’article est de Wilfried SEIBEL (directeur au Centre de Detmold), et porte le titre de Bedeutung als Kulturpflange (trad. : Signification comme plante cultivée ou, Etat de la production -du seigle-).


1.1 Degré de qualité du seigle

Dans le Monde le seigle est plutôt employé comme céréale de fourrage. Seuls les pays comme l’Autriche, la Tchécoslovaquie, l’Allemagne démocratique, la Pologne, la Suède, l’URSS et la Communauté Européenne utilisent le seigle pour la panification. L’évaluation de la qualité au Canada et aux USA est divisée en quatre grades (Tableau 1-2). Le poids en hl et des impuretés séparées sont des facteurs importants. À cela, il faut ajouter des catégories spéciales (special grades) pour le seigle ergoté (ergoty rye), le seigle humide (tough rye), le seigle infesté par les charançons (weevely rye) etc. Le système canadien et américain de graduation du seigle ne contient aucun facteur de qualité limitatif par rapport à la valeur boulangère du seigle.

1.2 Seigle panifiable - seigle fourrager

En République fédérale d'Allemagne, une portion considérable du seigle (de 40 à 50 %) a toujours été utilisée pour la panification. C'est pourquoi, on a effectué de nombreux essais afin de conférer des critères de qualité permettant, dès la première phase de la commercialisation, de faire la distinction entre seigle panifiable et seigle fourrager.

Pour obtenir la classification désirée, il a fallu entreprendre de vastes études, y compris au niveau de l'échantillonnage mondial en seigle. C'est DREWS et ses collaborateurs qui ont élaboré les documents les plus importants à ce sujet. Il fallut, à l'occasion de cette répartition, débattre de l'aspect économique d'une division qualitative.

Le commencement d'une division qualitative du seigle se concrétisa avec la J.O. (directive sur le raffinage) 1415/69. Un seigle obtenait alors la qualification de panifiable lorsque, lors d'un amylogramme (***) , la courbe maximale atteignait les 330 unités d'amylogramme. Cette détermination de la notion avait pour défaut que les confusions suivantes apparaissaient dans cette prescription légale :
- le système de fabrication de la farine n'était pas fixé,
- il n'y avait pas de méthode standardisée pour la mesure de la viscosité à l'amylographe (***).

On était, à l'époque, déjà conscient que la hauteur de la courbe toute seule n'était pas un facteur de qualité suffisant, étant donné qu'il n'existait aucune corrélation suffisante entre la hauteur de la courbe et le facteur le plus important de panification du seigle, l'élasticité de la mie.

À partir de 1970, SEIBEL et DREWS ont entamé de vastes études sur une meilleure évaluation du "seig le panifiable". Lors de ces études, on a supposé qu'à partir d'un seigle panifiable pouvant être travaillé, l'on devait pouvoir fabriquer tant un pain de seigle de qualité irréprochable qu'un pain complet de seigle de qualité irréprochable ou qu'un pain de seigle de grains concassés dit « schrot » (****).

Ces vastes recherches trouvèrent en 1973 une certaine conclusion. Le résultat était que l'on proposa de ne plus partir de la farine de seigle, mais d'un grain de seigle concassé fin précisément défini qui, dans le degré de finesse, correspondrait à la condition exigée pour l'exécution du "temps de chute" (indice Hagberg-Perten). Il est possible de reproduire l'élaboration de ce grain de seigle concassé fin. À la différence de l'ancienne évaluation (uniquement la hauteur de l'amylogramme au maximum de la courbe), on se concentrait à présent sur la température de gélification au maximum de la courbe, comme il apparaissait exister une corrélation exacte entre ce facteur et l'élasticité de la mie. En 1973, on proposa comme valeurs limite :
- on devrait atteindre au moins 200 Å (Angstrœm) à l'amylogramme du grain, et
- une température de gélification d'au moins 63°C au maximum de la courbe.
Le seigle qui présente ces qualités est le "seigle panifiable".

À partir de 1973, cette nouvelle notion de qualité pour le seigle panifiable fut présentée avant tout aux agriculteurs et au commerce dans des publications et des exposés. Dans le même temps, on démarra avec des essais comparatifs pour découvrir si le nouveau facteur de température de gélification m Maximum était saisissable de manière reproductible. Après la clarification de l'aspect méthodique et la communication complète des nouvelles données sur le seigle au monde économique, on reçut alors une proposition de Detmold pour un changement de la définition du seigle panifiable. On proposait comme méthodologie le standard n° 126 (18) de l'ICC (International Cereal Chemistry *****).

Cette proposition pour une nouvelle description du pain de seigle est à présent reprise dans la J.O. 1570/77. Il ne fait aucun doute que, par température de gélification, on entend la température à laquelle on mesure le maximum de gélification. L'ensemble des méthodes rationnelles disponibles pour mesurer les propriétés de gélification de l'amidon du seigle par l'amylographe entendent par température de gélification la température à laquelle un maximum est mesuré. C'est pourquoi l'ordonnance parle de température de gélification et non de températures de gélification.

Outre la définition du seigle panifiable, on a fixé d'autres critères en rapport avec la diminution et avec l'augmentation, ainsi qu'ils le sont représentés dans le tableau 1 - 3. Ce système correspond au système général de diminution et d'augmentation de la C.E. comme il l'est pratiqué de manière similaire pour d'autres variétés de céréales.

Cela fut à coup sûr un heureux hasard qu'à l'époque - après des années de discussions entre DREWS et SEIBEL et se basant sur de vastes &e acute;tudes - la valeur limite fut fixée à une température de gélification de 63°C. Cela surprend à coup sûr également que cette valeur limite pour la température de gélification et pour le maximum de la courbe n'ait pas dû être changée.


Tableau 1 - 2 : Critères de qualité américain du seigle

valeur maximum
Poids du boisseau (* )
Impuretés constituées par des grains et Impuretés diverses(**)

N° de grad.                min. 1b = hectoli.       % total                       % échaudés              % total

US-N° 1                     56,0     =72,07 hl.          2,0                               0,1                           3,0

US-N° 2                     54,0     =69,49 hl.          4,0                               0,2                           6,0

US-N° 3                     52,0     =66,92 hl.          7,0                               0,5                          10,0

US-N° 4                     49,0     =63,06 hl.         15,0                              3,0                           10,0



1 - 3 : standard de la C.E. pour le seigle panifiable

Teneur en eau max. 15,5 %
Poids du hl min. 68 kg
Grain brisé (endommagé ) max. 5 %
Impuretés max. 3 %
Grains germés max. 2,5 %
Grains échaudés ou échauffés max. 0,05 %
Amylogramme du grain concassé (***):
- température de gélification min. 63 °C
- viscosité max. min. 200 AE

Il s'est cependant trouvé des expériences et des études pour modifier ce système d'évaluation. Il fut tenté d'adjoi ndre l'indice Hagberg-Perten ("temps de chute"), c'est-à-dire d'introduire un système variable.
C'est ainsi que BOLLING e. a. proposa de modifier les valeurs limite de manière à ce que, pour des maxima de la courbe plus élevés, une température de gélification plus basse serait exigée. p.ex. :

Maximum de la courbe (AE)               Température de gélification (°C)

                       200                                                             63

                       350                                                             61

                       450                                                             60

Cette proposition ne trouva cependant aucun écho, étant donné qu'il manquait une corrélation avec le test de cuisson du seigle. Il va de soi, qu'à la valeur limite de 63°C comme température de gélification, des parties du seigle présentent encore une bonne élasticité de la mie pour une diminution minime de la température, et une élasticité de la mie légèrement moindre pour un dépassement minime de la température. Ce sont ces faits qui démontrent justement l'exactitude de la recommandation faite à l'époque.

Étant donné que le texte de loi sur la définition du seigle panifiable en rapport à la température de gélification avait conduit partiellement à de mauvaises interprétations dans le commerce céréalier, on a alors formulé le texte de loi de manière plus compréhensible :
« que la viscosité de la suspension grain concassé - eau atteigne au moins 200 unités d'après le diagramme de l'amylographe selon Brabender à une température d'au moins 63°C au plus haut point de la courbe. »
La définition du seigle panifiable a ainsi fait ses preuves pendant 15 années pour l'économie céréalière allemande au profit des meuneries, des boulangeries et surtout des consommateurs.






(*) Boisseau ou Bushel / Aux USA et en G.B. on mesure le livres le Winchester Bushel. Au Canada, par Impérial Bushel. Pour transposerla livre de Winchester Bushel par des Kgs en Hectolitre, il faut multiplier par 1, 287. Voir G.SCOTTI, Analyse physique des grains publié dans le Guide pratique des analyses dans les industries des céréales, éd. Lavoisier 1984, p.287.

(**) Impuretés constituées par des grains & Impuretés diverses / Les impuretés constituées par des grains contiennent des grains échauffés, attaqués par des prédateurs, présentant des colorations du germe, chauffés par séchage, mouchetés par moisissures. Les impuretés diverses contiennent des graines étrangères,nuisibles, des grains avariés,de la balle,des grains cariés, des insectes morts et des fragments d’insectes. Voir Pierre CHAS SERAY, Caractéristiques physiques des grains et de leurs dérivés, publié dans Les industries de première transformation des céréales, éd. Lavoisier 1998, p. 88 & 89

(***) Amylogramme & Amylographe / L’amylogramme est le résultat de l’analyse à l’amylographe. Il s’agit de prendre le plus haut niveau de la courbe, celle-ci mesurant par corrélation
ÿ entre la viscosité de farine ou grain concassé en suspension dans l’eau, soumis à un mouvement de rotation
ÿ et l’ élévation progressive de la température, évaluant à la fois la viscosité et la gélification de l’amidon.
La viscosité en mesurée en AE, c.a.d. en Angstroem, une unité de mesure de longueur d’onde, valant un dix-milliardième de mètre (10-10). Voir Jurgen-Michäel BRUMMER, Untersuchung von Roggen und Roggenmahlerzeugnissen,(trad. : Recherche sur le seigle et les produits de mouture du seigle,publié dans Roggen (trad. : Seigle), éd. Behr’s, 1988, p. 99 & 100.

(****) Schrot / Heinz ZWINGELBERG, Vermahlung und Roggenmahlerzeugnisse (trad. libre: Mouture et farine de seigle), publié dans ROGGEN, (trad. : SEIGLE), éd. Behr’s, 1988, p. 80 signale que la grandeur des mailles du tamis pour obtenir une farine complète de seigle passe jusqu’à un maximum de 600 millièmes de millimètres (ou microns) . Il faut un grandeur de mailles de 1.400 microns pour arriver à produire du « fein Schrot » (trad. : Grain concassé fin). Il existe plusieurs sortes de « Schrot », le fin (fein), le moyen (mittel) et le gros (groß). Dans certains endroits d’All emagne ont utilise aussi une quatrième sorte ; l’extra-gros. De plus Otto DOOSE dans Rustikale Sauerteigebrote, trad. : Les anciens pains au levain, éd. Matthaes 1985, p.10 à 13, fait une différence entre les moutures de « Schrot » sur meules et sur cylindres en subdivisant les quatres catégories précitées en « weiche » (trad. : moux -ou mieux- émoussé) et « scharfe » (trad. : tranchant).

(*****) I.C.C. / L’International Cereal Chemistry basé aux Etats-Unis d’Amérique ou Association International de la Chimie Céréalière a été crée en 1955 en vue d’établir des recherches et leurs applications ainsi que d’unifier les méthodes d’analyses et les normes. Voir E. NOUAT, Les enceintes de la normalisation des céréales en France, en Europe et au niveau mondial, publié dans Guide pratique des analyses dans les industries des céréales, éd. Lavoisier 1984, p.9.

Auteur: DEWALQUE Marc, Equipe BoulangerieNet.