Le beurre
Le beurre, corps gras de haute qualité, est très employé en pâtisserie. Longtemps concurrencé par la margarine en raison de son prix d'achat plus élevé, le beurre est, à l'heure actuelle, le seul corps gras utilisé dans les pâtisseries fines désireuses de proposer à leur clientèle des produits de qualité.
Précisons à ce sujet, que seuls les produits exclusivement préparés au beurre, sans mélange d'aucune sorte, ont droit à la mention "pur beurre" ou "au beurre". La législation est formelle. L'utilisation du mot beurre désigne l'emploi du produit laitier à l'exclusion de toute autre matière grasse. Tous les abus sont sévèrement réprimendés par la loi.
En ce qui concerne le beurre concentré, reconstitué selon des procédés industriels et souvent utilisé en pâtisserie, la mention "beurre" peut être utilisée à condition que la composition de ce produit soit identique à celle du beurre, produit laitier. Il convient donc de s'informer auprès de la firme productrice afin de savoir si la composition autorise l'appellation "au beurre". Celle-ci ne doit être accompagnée d'aucun qualificatif tel que : fin, surfin, supérieur ou autre.
La qualité gustative que confère le beurre aux produits est principalement due à son faible point de fusion compris entre 27 et 32° C (suivant son origine). En effet, celui-ci étant beaucoup moins élevé que la température du corps humain, le beurre fond rapidement dans la bouche, libérant ainsi toute sa saveur caractéristique, ne laissant pas d'arrière goût désagréable sur le palais comme le font les autres corps gras.
Composition
- eau 16 %
- lipides (matières grasses) 82 %
- matières minérales
- matières azotées 2 %
- glucides
L'eau (16 %), les matières minérales, les matières azotées, les glucides (2 %) constituent les 18 % de non gras. Ce taux est le maximum autorisé par la loi. De même que les 82 % de lipides est le taux minimum.
La densité du beurre est comprise entre 0,927 et 1,000.
Fabrication
Le beurre est obtenu à partir du lait de vache par les opérations suivantes :
a- Ecrémage du lait
Il se fait actuellement tout de suite après la traite dans les écrémeuses centrifuges. Il est obtenu ainsi la crème contenant en moyenne 30 à 45 % de lipides, 3 % de protides, 4 % de glucides (lactose), ainsi que des ferments lactiques.
b- Maturation de la crème
Cette opération est nécessaire pour obtenir un beurre ayant un arôme d'une saveur caractéristique. Elle est provoquée par l'action des ferments lactiques qui amènent la formation d'acide lactique. Il en découle une fermentation lactique modifiant l'aspect de la crème qui épaissie et provoquant la formation de différents produits tel que le diacétyle qui donne au beurre son goût de "noisette".
c- Barattage de la crème
Il se fait dans un appareil appelé "baratte". L'agitation à laquelle est soumise la crème a pour effet de faire se rassembler les grains de beurre qui grossissent et surnagent alors dans un liquide : le babeurre. Le barattage dure une trentaine de minutes et les grains de beurre atteignent, en fin d'opération, la taille d'un grain de blé.
d- Délaitage et malaxage
Le beurre est délaité, c'est-à-dire débarrassé du babeurre, puis lavé avec une eau à 12° C qui se doit d'être propre et potable. Il est ensuite malaxé pour éliminer le plus possible le babeurre qui, riche en micro-organismes, est un facteur d'altération ultérieure et pour lier toutes les particules de beurre afin de donner à celui-ci son aspect homogène.
e- Le moulage et le conditionnement
Après le malaxage, le beurre est moulé et conditionné en motte (de 10 kg) en plaquette (de 125, 250 et 500 g) et en carton (25 kg).
Le mode de fabrication a - b - c - d - e donnent des beurres d'appellations différentes suivant qu'il se soit déroulé à la ferme ou en laiterie.
- les beurres fermiers : fabriqués généralement artisanalement, le beurre n'offre pas de bonnes qualités bactériologiques du fait des multiples manipulations, du matériel non adapté aux besoins et du manque d'hygiène de fabrication. Sa conservation est limitée à quelques jours seulement, même au froid, ce qui implique que sa vente ne se fasse qu'à l'échelle locale.
- le beurre laitier : est fabriqué dans des laiteries à caractère plus ou moins industriel. Les normes de qualité d'hygiène permettent d'obtenir un beurre dont les qualités bactériologiques sont bien meilleures que le beurre fermier. Sa conservation à 2° C est de 20 jours environ, ce qui permet une diffusion plus importante que ce dernier.
Actuellement, les laiteries industrielles produisent du beurre de très bonne qualité pouvant se conserver facilement 3 mois à une température de 2° C.
- le beurre pasteurisé : le mode de fabrication diffère légèrement ; une fois la crème obtenue par centrifugation du lait, celle-ci est pasteurisée par procédé "H.T.S.T." ou stérilisée par procédé "U.H.T.". Les méthodes et le matériel employés sont les mêmes que pour le lait (voir chapitre "le lait"). La flore microbienne ainsi que les ferments lactiques sont détruits par l'action de la chaleur. Pour pouvoir obtenir la maturation de la crème, il est donc nécessaire de réensemencer celle-ci en ferments lactiques et en ferments d'arôme.
Le barattage, le délaitage et le malaxage, le moulage et le conditionnement, se font alors suivant une méthode appelée "en continu", se déroulant en un temps très court, sans aucune manipulation, dans des appareils en acier inoxydable, appelés "butyrateurs".
Conservation
Le beurre est une matière première très altérable à la chaleur ou à la lumière, il prend vite le goût des produits qui l'entourent, et il ne se conserve pas longtemps du fait de ses qualités bactériologiques. Pour remédier à cela, différents moyens et différentes méthodes sont mis en oeuvre pour assurer sa conservation dans les meilleures conditions possibles.
- dans un premier temps, beaucoup d'hygiène et de propreté sont nécessaires pendant la fabrication.
- le conditionnement dans un emballage fait d'une feuille de papier sulfurisé doublée d'une feuille de papier d'aluminium protège le beurre de la lumière et des mauvaises odeurs qui pourraient altérer son goût (poisson, viandes ).
- la conservation à une température de 2° C donne de bons résultats mais il ne faut pas stocker une quantité trop importante. Il est préférable de se réapprovisionner régulièrement (une fois par semaine), suivant les besoins d'utilisation.
- le beurre pasteurisé offre de bonnes garanties de conservation (2 à 3 mois à 2° C).
- le beurre demi-sel. Salés à 5 % maximum, les beurres fermiers et laitiers se conservent dans de meilleures conditions.
- le beurre salé. Salés à 10 % maximum, leur durée de conservation est augmentée.
- la congélation à -12° C permet le stockage et la conservation du beurre pendant plusieurs mois.
- conservé à une température de -40° C, le beurre peut être stocké très longtemps (plusieurs années). Pour sa commercialisation, il devra être fondu, rebaratté et parfumé. Il portera la mention "beurre de transformation vanillé".
- le beurre déshydraté contenant 99,3 % de matière grasse et 0,5 % maximum d'eau peut être conservé très longtemps au froid ; il est nécessaire de réhydrater ce beurre pour l'utiliser.
- le beurre fondu est obtenu en faisant fondre du beurre à 45° C. L'eau et le "petit lait" se séparent des matières grasses qui surnagent sur le liquide. Elles sont ensuite retirées et conservées au frais. Cette méthode n'est presque plus utilisée.
Conseils d'utilisation
Le beurre que nous employons pour la fabrication des gâteaux et pâtisseries doit toujours être de très bonne qualité et très frais, surtout quand il entre dans la composition d'un produit qui ne subira pas de cuisson (crème au beurre, crème mousseline, garniture ).
La réalisation de certaines préparations, principalement le feuilletage, est très délicate surtout quand la température des locaux est élevée. Il est donc nécessaire d'utiliser du beurre ayant une bonne consistance, spécialement étudié pour son emploi dans des conditions particulières. Pour faciliter le travail, il est conseillé d'entreposer les pâtons de feuilletage pendant le temps de repos, dans un réfrigérateur ou dans un local très frais, en faisant attention toutefois de ne pas laisser le beurre trop durcir. S'il est trop ferme, le tourrage ne pourra pas être bien conduit et le feuilletage des produits à la cuisson sera irrégulier.
Pour que l'incorporation du beurre dans une pâte levée (brioche, pâte à pains au lait) se fasse dans de bonnes conditions, il doit avoir approximativement la même consistance que la pâte. S'il est trop dur, il suffit de le travailler en le battant quelques instants soit à la main, soit à l'aide d'un rouleau.
Certaines préparations nécessitent l'emploi du beurre en "pommade" (petits fours secs, cakes ). Pour ce faire, il suffit de travailler le beurre à la spature ou à l'aide d'un fouet tout en le chauffant légèrement. Il faut veiller à ne pas le faire fondre, car fondu, il perd de ses propriétés.
Le summum de la qualité demeure les beurres d'appellation d'origine contrôlée (AOC) . L AOC (1) garantit une qualité particulière, liée à la méthode de fabrication de ces beurres et à leurs caractéristiques régionales.
Actuellement, seuls les beurres d'Isigny et de la région Charentes - Poitou ("Charentes-Poitou", "beurre de Charente", "beurre des Deux-Sèvres") bénéficient d'une appellation d'origine contrôlée.
Les amateurs de beurres bien colorés, onctueux, au bouquet bien affirmé opteront pour les produits normands.
Préférant un arôme plus fin, une pâte plus ferme, ils choisiront des beurres charentais. Les beurres normands et bretons sont, en général, plus gras ou tendres, les vaches étant alimentées toute lannée en herbe. Les beurres des Charentes et de lEst sont plus durs ou secs.
A partir du mois d'avril, et pendant quelques semaines seulement, on commercialise le beurre de printemps, un beurre gras par excellence. Il est confectionné à partir du lait des vaches qui ont repris le chemin des pâturages renaissants, après la longue période hivernale en étable. Lherbe jeune et fraîche lui confère une saveur particulière très aromatique. Très coloré, ce beurre est particulièrement riche en vitamine A.
La margarine
Beurre ou margarine, il faut dire que le choix est principalement une question d'habitude. Une certitude en France: dans l'Ouest on est plutôt inconditionnel du beurre et dans l'Est, plutôt partisan de la margarine.
Au niveau commercial, il faut savoir qu'il y aura toujours des consommateurs amateurs de croissants au beurre tandis que d'autres préféreront les croissants ordinaires. Alors autant répondre à ces deux types de demandes !
Si le beurre n'est pas spécialement perçu comme un produit diététique, la margarine l'est au contraire; d'autant plus si celle-ci est fabriquée à partir de matières grasses d'origine végétale.
Autre avantage, c'est un produit qui se comporte mieux techniquement lors des fortes chaleurs. Cette caractéristique peut maintenant être retrouvée dans certains beurres fractionnés. Enfin en matière de coût, la margarine l'emporte. Le prix d'achat peut être jusqu'à 30% moins cher; différence moins favorable avec des margarines de grande qualité et des corps gras mixtes. En effet, de nombreux fabricants se sont lancés sur le créneau du corps gras mixte: à base de margarine pour sa facilité d'utilisation et de beurre pour son goût et son arôme.
Quant à son origine, c'est Napoléon III qui avait lancé un concours pour trouver un substitut au beurre et résoudre les problèmes de prix et de conservation.
En 1869 un pharmacien, Hyppolite Mège-Mouriès, a donc mis en place une émulsion d'eau dans l'huile, appelée "margarine", nom d'origine grecque.
Dès 1872, la margarine est fabriquée industriellement et le nombre de margariniers explose en une dizaine d'année. Aujourd'hui, il ne reste plus qu'un seul industriel français indépendant implanté dans le Nord.
Composition
-eau 16%
-lipides (matières grasses de 80 à 90%)
-matières minérales
-glucides 2 à 3 %
La dénomination "margarine" est réservée aux produits obtenus par mélange de matières grasses et d'eau ou de lait ou de dérivés du lait se présentant sous la forme d'une émulsion renfermant au moins 80% de matière grasse dont au plus 3% d'origine laitière.
Fabrication
La margarine est une émulsion d'eau dans l'huile, dans laquelle les gouttelettes d'eau sont séparées par des cristaux de graisse. Le process de fabrication présente les étapes suivantes:
a-Préparation de la phase grasse
Elle est composée de différentes huiles liquides à température ambiante et de "matières grasses hydrogénées". Les fabricants modifient en effet la nature des acides gras pour obtenir une margarine solide avec des points de fusion plus ou moins haut. On parle d'hydrogénation.
C'est en jouant sur le rapport entre ces deux types d'huile que l'on peut élaborer des produits répondant à des usages variés. A ces matières grasses sont ajoutés différents émulsifiants et arômes.
b-Préparation de la phase aqueuse
Elle est composée d'eau, de lait (pas dans les margarines végétales), d'émulsifiants (ils facilitent et stabilisent l'émulsion), de sel, de sucre et d'agents d'acidité afin de favoriser la conservation.
c-Mélange
Le mélange ou émulsion est la dispersion d'un liquide en gouttelettes souvent microscopiques dans un autre liquide dans lequel il n'est pas miscible. Pour la margarine, on distingue alors la phase dispersée sous forme de gouttelettes (aqueuse) de la phase continue (grasse).
d-Emulsion
Les émulsifiants vont ici permettre de réaliser un mélange homogène à partir de ces deux phases non miscibles.
e-Cristallisation
La stabilité finale du produit est obtenue par cristallisation de la phase grasse au sein de l'émulsion. Cela consiste à déposer l'émulsion sur un tambour refroidi à 20°C qui provoque la cristallisation immédiate.
f-Malaxage
Le produit sort du cristallisateur sous forme d'un film. Le produit est acheminé par trémie jusqu'au malaxeur. Cet appareil va désaérer et malaxer le mélange en lui donnant consistance, souplesse et homogénéité.
g-Conditionnement
Après malaxage, le produit est conditionné.
Selon les différentes recettes et les méthodes utilisées en c-d-e-f, la margarine pourra avoir une technicité particulière. Cela consiste en effet à jouer sur les nuances des caractéristiques principales:
Couleur: jaune pâle due à l'huile de palme naturellement colorée.
Texture: lisse et homogène ne présentant pas de grains, de tâches et d'alvéoles.
Consistance: dureté plus ou moins grande (mesure de pénétromètre).
Plasticité: malléabilité qui permet à la margarine de s'étirer ou de s'aplatir sans se rompre.
Souplesse: la margarine se prête aux déformations aussi bien à froid qu'à chaud.
Fondant au palais; à la dégustation le gras doit fondre rapidement dans la bouche.
Conservation
Les margarines étant des produits alimentaires, leur durée de vie est limitée car elles peuvent subir un certain nombre d'altérations. En matière de goût, il peut être altéré par un rancissement du à l'oxydation. Au niveau microbiologique, il peut y avoir un développement de moisissures causé par un stockage dans l'humidité.
Pour éviter ces altérations, il faut stocker les margarines dans de bonnes conditions et en particulier dans des locaux secs et tempérés (10 à 13°C), à l'abri de toute source vive de chaleur et de lumière. Enfin, il faut éviter la proximité de produits pouvant communiquer des odeurs fortes et persistantes.
Chez l'industriel, l'utilisation de mélanges de différentes matières grasses à différents degrés d'hydrogénation, permet d'obtenir des margarines très stables au cours des saisons.
Conseils d'utilisation
Les spécificités dans la gamme des margarines permettent de répondre aux besoins particuliers des différentes utilisations.
Par exemple, pour une margarine de table, la tartinabilité et les qualités sensorielles seront prédominantes.
Pour les margarines de cuisson, le taux d'éclaboussure est pris en compte (margarine qui ne projette pas d'eau au moment de la chauffe) ainsi que la résistance à la chaleur.
Pour la boulangerie-pâtisserie, la consistance et la dureté de la margarine sont des critères essentiels.
Il semble donc important de profiter de l'éventail de la gamme et utiliser la margarine spécifique à l'utilisation recherchée : diététique, cuisson de viandes, fabrication de garnitures, pâtes levées et feuilletées, à base de corps gras composés
En conclusion, la margarine ou "ordinaire" est un produit qu'il ne faut pas dénigrer mais il vaut mieux jauger ses qualités techniques, diététiques et microbiologiques. On peut retenir en bref que ce produit assure souplesse et facilité d'emploi; bon comportement à la chaleur, régularité de la consistance